2.1.1 Les sédiments marins : le climat gravé dans les roches
Les sédiments des fonds des océans contiennent des informations sur les conditions climatiques passées. Les scientifiques étudient les atomes des minéraux constituant les roches et les coquilles des organismes marins (EnSavoirPlus 2.1). Ils en déduisent les variations de la température et du volume des calottes polaires au cours du temps. Les forages s’effectuent dans tous les océans du globe, ce qui permet de déterminer les différences locales des changements climatiques et les courants océaniques.
2.1.2 Les carottages glaciaires : les glaces racontent le climat
Les glaces sont des archives exceptionnelles des climats du passé : elles enregistrent la température et piègent également de l’air « fossile » sous forme de bulles (EnSavoirPlus 2.2). Les glaces étudiées sont celles des calottes polaires et des glaciers de montagne. Aux pôles, les glaces sont très épaisses ; les glaces profondes peuvent atteindre l’âge d’un million d’années. Les carottages des glaciers de montagne sont moins profonds mais enregistrent les variations climatiques régionales plus précisément. Par exemple, l’analyse de la glace sur 20 000 ans du Sajama en Bolivie a montré les rejets récents en métaux lourds dans l’atmosphère (Barbante et al, 2004Barbante C., Schwikowski M., Döring T. et al, 2004 : Historical record of European emissions of heavy metals to the Atmosphere since the 1650s from Alpine snow/ice cores drilled near Monte Rosa. Environ. Sci. Technol., 38(15), 4085-4090.).
Les données déductibles des carottes de glace
Étude de la glace
La conductivité, c’est-à-dire la capacité du courant électrique à traverser la glace, donne une première approche de la température. En période froide, les continents sont plus arides et le transport de poussières par l’atmosphère est renforcé (Wolff et al, 2006Wolff E.W., Fischer H., Fundel F., et al, 2006 : Southern Ocean sea-ice extent, productivity and iron flux over the past eight glacial cycles. Nature, 440, 491-496. . La conductivité, qui dépend de la concentration en poussières continentales et en acides, est relativement faible.
La composition des molécules d’eau de la glace (isotopes) renseigne précisément sur la température de l’air à l’époque de la formation de la neige.
Étude des sédiments et des poussières
La glace conserve les particules en suspension dans l’atmosphère (aérosols) apportées par la neige : poussières d’origine continentale et sels d’origine marine. Ces deux composants sont plus concentrés en période glaciaire en raison d’une intensité des vents plus importante.
Des fragments d’Acide Désoxyribonucléique (ADN) retrouvés dans les carottes de glace permettent de reconstituer la faune et la flore à certaines périodes (Willerslev et al, 2007Willerslev E., Cappellini E., Boomsma W., et al, 2007 : Ancient Biomolecules from Deep Ice Cores Reveal a Forested Southern Greenland. Science, 317, 111-114.).
Étude des bulles d’air : de l’air d’un million d’années conservé dans la glace
La neige se tasse avec le temps et devient progressivement de la glace en piégeant des bulles d’air et des poussières (Figures 2.1 et 2.2). Cet air piégé constitue un échantillon de l’atmosphère à l’époque où la neige s’est déposée. Il permet de déterminer notamment les concentrations des gaz à effet de serre (Figure 2.5).
Comme la transformation de neige en glace nécessite quelques dizaines à quelques milliers d’années, l’air piégé est légèrement plus jeune que la glace qui le contient (Raynaud & Lorius, 2004Raynaud D., & Lorius C., 2004 : Climat et atmosphère : la mémoire des glaces. C. R. Geoscience 336, 647–656.). Une imprécision existe sur l’âge de l’air, qui diminue si l’accumulation de neige est forte (Jouzel, 2003Jouzel J., 2003 : Climat du passé (400 000 ans) : des temps géologiques à la dérive actuelle. C. R. Geoscience, 335(6-7), 509-524.).
Les différents carottages polaires
Des carottes de glace sont extraites en Antarctique et au Groenland (EnSavoirPlus 2.2). Comme les calottes polaires sont très épaisses, des forages de plusieurs kilomètres sont réalisés. Le dernier forage, en Antarctique (Dôme Concordia), est profond de plus de trois kilomètres et a permis de découvrir de la glace de près d’un million d’années (EPICA Community Members, 2004EPICA Community Members, 2004 : Eight glacial cycles from an Antarctic ice core, Nature, 429, 623–628.). Les forages sont creusés au niveau du dôme central, c’est-à-dire dans la zone où la calotte est la plus épaisse et où la glace se déplace verticalement.